Eloge par L. Baud - Réponse de R. Ardaillou
Films - Photos remise médaille
Monsieur le Président, Cher Pierre,
Chers Amis,
J’ai été très touché par la décision du Conseil d’administration de la Société de Néphrologie de me décerner, cette année, la médaille Jean Hamburger. J’en remercie tout particulièrement son président Pierre Ronco. Je remercie également Laurent Baud de l’introduction trop élogieuse que vous venez d’entendre. Je voudrais en premier vous dire quelques mots sur mes liens avec la Société de Néphrologie et rappeler ce qu’ont été ses débuts.
La Société de Néphrologie s’est d’abord appelée Société de Pathologie Rénale. Elle est devenue Société de Néphrologie à l’initiative de Jean Hamburger qui voulait ainsi souligner que ses sujets d’étude dépassaient la pathologie des reins et incluaient tout ce qui concernait les reins, c'est-à-dire leur physiologie, biologie cellulaire, développement et structure. Il aimait rappeler que le terme était ancien puisque présent dans le « Littré ». Nos réunions se tenaient deux fois par an, en mai et octobre, d’abord à l’amphithéâtre Lavoisier de la Faculté de Médecine, rue des Saints-Pères, puis à l’Hôpital Necker. J’ai succédé comme secrétaire à Marcel Legrain en 1966 et ai rempli ces fonctions pendant six ans avec trois présidents, les Pr. Traeger, Mirouze et Reubi. Le Secrétaire était essentiellement chargé d’établir le programme des réunions de la Société et celles du Conseil d’administration. Les membres de la Société envoyaient un résumé de leurs communications qui étaient inscrites automatiquement au programme sans examen par un comité de lecture dans la seule limite du temps disponible. Les réunions groupaient une cinquantaine de participants. Même si j’embellis un peu le passé, les sujets traités traduisaient l’expansion des études néphrologiques, leur originalité et leur rapide progression. Quelques exemples montrent bien la créativité de l’époque avec l’identification de la néphropathie à IgA par Berger et Gall, les débuts de la microscopie électronique rénale avec Michielsen montrant la fusion des pieds des podocytes dans le syndrome néphrotique, l’utilisation des radioisotopes en physiologie rénale avec Morel conduisant à la démonstration de la sécrétion tubulaire du potassium, les premières publications de greffe rénale réussie par les deux groupes de Jean Hamburger et René Kuss. Jean Hamburger était la personnalité marquante de la Société et ses remarques attendues avec inquiétude. Le nombre des centres de néphrologie dans l’Europe francophone était réduit. En France, les premiers services spécialisés furent créés, en dehors de Paris, à Lyon avec J Traeger et à Toulouse avec JM Suc. En Belgique, Bruxelles et Liège comptaient deux néphrologues éminents les Pr Lambert et Nizet. La Suisse était représentée par F Reubi, de Berne et Alex Müller, de Genève. J’étais alors l’assistant de Gabriel Richet et notre petit groupe qui comprenait aussi, Claude Amiel et Liliane Morel-Maroger devenue plus tard Striker, s’efforçait de créer un nouveau centre de néphrologie sur la rive droite de la Seine, à l’Hôpital Tenon.
Je ne vous parlerai pas des différentes étapes de ma carrière que L. Baud vient d’évoquer, mais souhaite simplement insister sur quelques points :
1- Pour un médecin néphrologue universitaire, la recherche est le complément nécessaire de l’activité clinique et cette recherche doit toujours comporter un volet clinique. Il me semble nécessaire que dans ses années d’apprentissage, un futur néphrologue acquière une 2ème spécialité et les techniques qui l’accompagnent ; pour moi, ce fut la physiologie et la biologie cellulaire, mais ce peut être l’anatomie pathologique, l’immunologie, les processus de thrombose et de fibrinolyse, l’embryologie et le développement, l’imagerie de l’organe et de la cellule ;
2- La plus grande récompense est de former des élèves et d’avoir avec eux des relations confiantes. J’ai eu beaucoup de chances à cet égard et je voudrais terminer en les remerciant tous, L Baud, J Sraer, D Chansel, JC Dussaule, F Paillard, C Chatziantoniou sans oublier mon épouse à laquelle je dois tant. J’ai eu aussi la joie de voir P Ronco me succéder à la direction de l’Unité. Il a pu mener à bien la construction d’un nouveau bâtiment de recherches que j’avais initiée quelques années plus tôt et il a rassemblé autour de lui une équipe de chercheurs et d’universitaires de qualité. Comme j’avais tenté de le faire, il a su mettre la recherche clinique au premier plan de ses préoccupations. C’est un grand plaisir pour moi de pouvoir continuer à travailler avec lui au sein de la Fondation du Rein dont les néphrologues m’ont confié la présidence et dont P Ronco préside le conseil scientifique. J’avais dit, lorsque j’ai pris ma retraite, que j’avais abandonné successivement les fonctions de chef de service, directeur d’unité et professeur de physiologie comme les musiciens de la Symphonie des Adieux de Haydn quittant tour à tour la scène après avoir soufflé la bougie qui éclaire leur partition. Une bougie s’est rallumée pour moi et je suis revenu sur scène avec la Fondation du Rein ce qui m’a permis de prendre part de nouveau aux réunions du Conseil d’administration de la Société de Néphrologie. Je crois avoir maintenant bouclé le cycle. La médaille Jean Hamburger est donc pour moi la meilleure récompense que je pouvais souhaiter.
Raymond Ardaillou